L’Indépendance ou Rien !

Si Léon Bocquet , René Maran, Foulon de Vaulx et Gahisto avaient eu l’occasion d’échanger ces mots, peut-être l’auraient-ils fait ainsi… Mais ce dialogue, bien que plausible, demeure une création fictive, fruit d’une imagination souhaitant faire revivre ces figures littéraires. » Titre : L’Indépendance ou Rien ! Scène : Un café de Lille, novembre 1918. La…



Si Léon Bocquet , René Maran, Foulon de Vaulx et Gahisto avaient eu l’occasion d’échanger ces mots, peut-être l’auraient-ils fait ainsi… Mais ce dialogue, bien que plausible, demeure une création fictive, fruit d’une imagination souhaitant faire revivre ces figures littéraires. »

Titre : L’Indépendance ou Rien !

Scène : Un café de Lille, novembre 1918. La guerre est finie, les cloches sonnent l’armistice, et l’heure est à la reconstruction. Autour d’une table en bois sombre, les membres du Beffroi trinquent à la victoire… et à l’idée de relancer leur revue. René Maran, Foulon de Vaulx et Gahisto ont une proposition alléchante. Mais Léon Bocquet, fidèle à son esprit libre, ne l’entend pas de cette oreille…


RENÉ MARAN (enthousiaste, levant son verre) — Messieurs, à la paix retrouvée ! Et à la renaissance du Beffroi !

FOULON DE VAULX (opine, joyeux) — La revue du Nord doit revivre ! La littérature a survécu aux obus, elle mérite bien un second souffle.

GAHISTO (tapotant la table) — Et pour ça, nous avons un plan ! De l’argent, des plumes brillantes… et nous offrons même notre collaboration gratuite !

LÉON BOCQUET (les yeux plissés, méfiant)Gratuite ? Tiens donc. Et moi, je suppose que je devrais simplement vous remercier et suivre vos idées ?

RENÉ MARAN (riant) — Oh non, Léon, voyons ! Nous voulons juste aider… avec quelques conseils éditoriaux.

FOULON DE VAULX (toussotant) — Et peut-être une petite direction artistique…

GAHISTO (ajoute en souriant) — Sans oublier quelques ajustements dans le ton… un peu plus moderne, un peu plus… influencé.

LÉON BOCQUET (levant les mains, faussement horrifié) — Ah, je vois ! Vous m’offrez des fonds, du soutien, et en échange… je dois signer avec mon sang un pacte littéraire ?

RENÉ MARAN (amusé) — Rien d’aussi dramatique, Léon !

LÉON BOCQUET (croisant les bras, implacable) — Et si demain vous me dites : « Léon, ajoute donc un peu plus de ceci, un peu moins de cela… » ? Vous croyez que je vais troquer mon indépendance pour quelques billets et des plumes bavardes ?

FOULON DE VAULX (plaisantant) — On dit que la littérature ne nourrit pas son homme…

LÉON BOCQUET (souriant, ironique) — Non, mais elle lui évite l’indigestion des compromis !

GAHISTO (soupirant) — Donc c’est non ?

LÉON BOCQUET (tranchant, mais amusé) — C’est non. Je préfère un Beffroi fauché mais libre qu’un Beffroi engraissé et enchaîné !

RENÉ MARAN (levant son verre à nouveau, malicieux) — Eh bien, trinquons à l’homme le plus têtu de Lille !

(Ils rient. Le Beffroi ne renaîtra pas comme ils l’avaient imaginé, mais Bocquet restera fidèle à lui-même. Et après tout, c’est aussi ça, la victoire.)


MORALE : Un bon écrivain préfère la plume à l’or… mais il accepte toujours un verre de vin pour en discuter !

« Lors de l’armistice, le groupe du Beffroi songea à faire reparaître la revue. En particulier René Maran, Foulon de Vaulx et Gahisto offrirent leur collaboration gratuite et des appuis financiers qui auraient pu favoriser la renaissance de la revue. Mais Bocquet voulait garder son indépendance absolue. En désaccord avec les idées de la génération nouvelle, il préféra ne pas donner suite à ce projet. Il devait s’en repentir plus tard, comme il le confia à René Maran.

« La revue Le Beffroi de Léon Bocquet (1900-1913) , par Anna Mascarello