Les destinées mauvaises 

LES DESTINÉES MAUVAISES, par Léon Bocquet (éd. Malfère). — Hégésippe Moreau, Pierre de Querlon, Tristan Corbière, Léon Deubel, Guy Jarnouen de Villartay sont ici réunis par les soins d’un lettré averti. Les uns et les autres durent peut-être un peu de leur renommée à leur destinée curieuse et maudite. Léon Bocquet a su faire revivre…



LES DESTINÉES MAUVAISES, par Léon Bocquet (éd. Malfère). — Hégésippe Moreau, Pierre de Querlon, Tristan Corbière, Léon Deubel, Guy Jarnouen de Villartay sont ici réunis par les soins d’un lettré averti. Les uns et les autres durent peut-être un peu de leur renommée à leur destinée curieuse et maudite. Léon Bocquet a su faire revivre dans leur atmosphère ces compagnons de l’aventure littéraire. On peut méditer ces vies, ou grises ou parées des splendides couleurs de la misère. Il n’y a plus grand’chose à écrire après la très sensible évocation de Léon Bocquet sur ces cinq hommes que la maladie et la mauvaise fortune devaient vaincre quelquefois tragiquement.

Pierre-Marc Orlan, La Petite Gironde du 20 novembre 1923 – Retronews.fr


Il y avait aussi un livre de critique : Les Mauvaises destinées, de Léon Bocquet, galerie de visages désolés de passants, distingués parmi la foule haletante en marche vers la gloire. Destinée mauvaise : celle d’Hégésippe Moreau ; ou déclassée, celle de Tristan Corbière ; ou excentrique, Léon Deubel ; la dernier poète maudit, celle de G. de Villartay, un breton méconnu ; celle enfin de P. de Gourlon, dans le sillage de George Sand. De chacune de ces figures littéraires, Léon Bocquet trace un portrait sensible et vivant, enrichi de faits, d’anecdotes inédites qui donnent une valeur documentaire certaine à ce livre.

L’Avenir du 7 novembre 1923 – Retronews.fr


Les Destinées mauvaises, par M. Léon Bocquet (Malfère, éditeur). — Le poète Léon Bocquet s’est penché avec une pitié fraternelle et une profonde émotion sur les destinées malheureuses de quelques-uns de ses confrères. En des études substantielles, fort bien documentées et particulièrement animées de vie, il nous retrace les infortunes d’Hégésippe Moreau, qui ne sut jamais s’adapter à l’existence, de Tristan Corbière, qui « ébaucha dans la souffrance et l’amertume, en dehors de la sécurisable pitié, la sculpture d’un grand rêve désespéré » ; du pitoyable et infortuné Léon Deubel, de Pierre de Querlon et de Guy Jarnouen de Villartay. En écrivant ces études, M. Léon Bocquet a fait à la fois œuvre de critique et de poète.

Louis PAYEN. La Presse du 26 novembre 1923 – Retronews.fr

Dans cet ouvrage : Les Destinées mauvaises, M. Léon Bocquet a voulu, comme il le dit lui-même, restituer chacune de ces figures marquées du signe fatal « dans les conditions psychologiques qui permettent d’apprécier aujourd’hui la valeur exacte de leur manifestation éphémère ». Il a voulu préserver de l’indifférence et de l’oubli « quelques mémoires qui avaient espéré voir rayonner autour de leur nom et de leurs efforts traversés d’épreuves un peu de cette clarté que dispense l’avare soleil des morts ». Voici Hégésippe Moreau. À côté du poète, M. Bocquet découvre en lui un nouvelliste « de haute lignée française », un prosateur et un admirable épistolier. Et il conclut : sa plus sûre gloire est peut-être là. Tristan Corbière : œuvre imparfaite et obscure où l’on n’escalade les cimes que pour être précipité ensuite aux abîmes. Léon Deubel, « le dernier poète maudit », Pierre de Querlon, la gravité souriante, ce jeune romancier de Céline, fille des champs qui avait acquis, à vingt-quatre ans, un métier d’une inquiétante perfection. Il se précipitait vers la gloire avec une conviction un peu ironique. Je me souviens qu’il avait collectionné en un gros cahier tous les articles qu’avait suscités son jeune talent. Il avait inscrit, sur ce cahier, ce mot : Gloriole. Enfin, voici un poète breton « méconnu » : Guy Jarnouen de Villartay, mort à 27 ans en 1907. Je voudrais que l’on retienne, de son œuvre inachevée, au moins ce vers, par lequel il exprime son désespoir d’être « celui qui meurt de n’avoir pas vécu » : Et comme Œdipe, un soir qu’Antigone aurait fui…

Mercure de France, 1 déc. 1923 – Retronews.fr


Les Destinées mauvaises, par Léon Bocquet (Bibliothèque du Hérisson, à Amiens). Voilà un fort beau livre, baigné d’humanité, empreint d’une grande et sereine mélancolie. Je ne connais pas Léon Bocquet. Mais je sais qu’il ne se contente pas d’être un écrivain de grand mérite. Je sais qu’il est aussi — chose si rare — un homme de cœur. Car il a trouvé des accents émouvants pour peindre la détresse morale et matérielle de ces poètes qui ont manqué leur vie et malencontreusement gâché les dons les plus heureux : Hégésippe Moreau, Tristan Corbière, Léon Deubel, Pierre de Querlon, Guy Jarnouen de Villartay. Ce recueil d’études littéraires ne prétend pas donner la physionomie d’une époque, il ne vise qu’à préciser l’atmosphère intellectuelle à certaines périodes de transition. Ces visages désolés de poètes, distingués parmi la foule en marche vers la gloire, présentent ce trait commun que leur existence, pareillement brève et diversement douloureuse, provoque la sympathie devant le spectacle de tant de beaux rêves interrompus, et aussi le regret à cause des belles promesses de talent brutalement anéanties à la veille de l’épanouissement total. Léon Bocquet, animé du zèle le plus fervent, s’est attaché à restituer chacune de ces figures dans les conditions psychologiques permettant d’apprécier exactement la qualité de leur manifestation éphémère. Et il est parvenu ainsi, le plus naturellement du monde, parce qu’il est sincère, à préserver de l’indifférence et de l’oubli quelques artistes qui avaient espéré voir rayonner autour de leurs efforts traversés d’épreuves l’éclat de cette gloire que le grand Balzac appela si magnifiquement « le soleil des morts ».

Voilà une « révision des valeurs » qui s’imposait. Il faut savoir gré à Léon Bocquet de l’avoir si magistralement réalisée. J’ai particulièrement goûté l’étude consacréé à Tristan Corbière, l’auteur des Amours Jaunes, poèmes précurseurs publiés en 1873 — alors que Paul Verlaine était encore Parnassien. Un camarade en bouquinant le long du quai Voltaire, avait trouvé un jour, au fond d’une boîte, ce volume au titre bizarre et, le lendemain soir, transportait d’admiration notre petit cénacle en récitant les savoureux quatrains du Cantique Spirituel. Charles Le Goffic doit s’en souvenir…

Henry Spont – L’Ere nouvelle du 6 avril 1924 – Retronews.fr