

L’écrivain qui a si bien raconté la vie des poètes et analysé leurs œuvres, donne, avec cette biographie de Téniers et la définition de son art, la mesure de son jugement critique. Il voit l’homme tel qu’il est, tranquille compagnon, presque insensible à ce qui touche les autres, et même aux commotions qui peuvent ébranler sa patrie, suffisamment réjoui de l’existence dans son manoir rural de Dry-Toren, où il exécute les tableaux qui font sa renommée et qui assurent l’avenir de sa gloire de peintre.
Préface de David Téniers, Gustave Geffroy
Le livre de M. Léon Bocquet sur Téniers nous paraît faire la juste part à l’homme, à son œuvre, à l’art qui lui est propre. Une connaissance parfaite et émue, familière, des mœurs et types que continuent aujourd’hui dans les Flandres ceux que Téniers a fixés, disposait M. Léon Bocquet à la compétence, voire à l’éloquence, sur le peintre des cabarets flamands. Il ne se complaît pas trop aux sujets de Téniers, non plus qu’à sa vie, mêlée pourtant à celle de Rubens et de tant d’autres artistes : il décrit la manière de ce petit maître exquis avec une netteté excellente, sans en rien laisser dans l’ombre. Un critique exigeant pourrait désirer que l’écrivain eût insisté davantage sur les sources du clair-obscur que Téniers a manié avec tant de fines souplesses. D’où lui venait-il ? Pas du seul Rubens. Pas de la seule tradition flamande, dans laquelle, porté au plus haut point du premier coup par Jean Van Eyck, il s’était progressivement affaibli. Des Hollandais, certainement, dont il eût fallu peut-être étudier de plus près l’effet sur Téniers. Mais c’est être bien difficile que de faire cette petite chicane à M. Léon Bocquet : son livre, non seulement par l’équilibre des parties, mais par la pénétration, le style vivant, donnera un joyeux contentement au lecteur qui est de la partie comme au lecteur ordinaire.
Un point pourtant à regretter dans ce précieux petit volume (et dans toute la série) : pourquoi pas une page ou deux sur les admirables graveurs si indignement ignorés, de ces grands peintres ?
René Brecy, L’Action française du 30 décembre 1924 – Retronews.fr